Elsa Faucillon (député communiste, 1re circonscription des Hauts-de-Seine)
À partir du mardi 17 novembre, est débattue à l’Assemblée nationale une nouvelle loi sécuritaire qui accompagne le raidissement autoritaire de la pratique macroniste du pouvoir.
Le tournant répressif engagé à l’encontre de la mobilisation contre la Loi travail en 2016 s’est accentué à l’occasion du mouvement des gilets jaunes. Cette nouvelle doctrine du maintien de l’ordre a laissé nombre d’éborgnés, mutilés, blessés.
Cette réalité était déjà connue de trop d’habitants des quartiers populaires qui ont fait les frais des expérimentations de nouveaux dispositifs policiers, à commencer par l’utilisation d’armements dangereux comme les LBD.
Alors que notre société déjà éreintée par les crises écologique, sociale et économique a besoin d’apaisement pour trouver des réponses fermes et efficaces, le seul réflexe du gouvernement est d’établir une société du soupçon généralisé. Nous devenons tous des coupables potentiels en puissance.Lorsque confrontés à la première vague, notre sécurité résidait dans la solidité de notre système de santé et l’accès aux masques et matériels utilisés par les soignants, ils étaient aux abonnés absents. Lorsqu’aujourd’hui les petits commerçants demandent de l’aide pour sécuriser leur activité professionnelle et ne pas mettre la clef sous la porte, une véritable réponse se fait attendre. Quand 565 personnes par an meurent d’un accident du travail, la sécurité n’est pas une priorité. Quand plus de 12% des femmes en France déclarent avoir été victimes de viol, les moyens demandés par les associations ne sont pas délivrés. C’est au moyen de ces renoncements qu’ils peuvent réduire notre sécurité à un énième projet de renforcement des dispositifs policiers répressifs et de recul de nos libertés. Faute de la volonté de mettre en place des mesures permettant aux citoyens de vivre leur vie, il faut asseoir son autorité par la force, la force violente plutôt que la force du droit.
Surveiller et punir
Dans ce dernier projet, la loi dite de « sécurité globale » viendra de nouveau chambouler le code de la sécurité intérieure, le code pénal, le code de procédure pénale, le code de la route, le code de la défense et jusqu’à la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse ! Dans le bouleversement apparent ne se joue qu’une vieille idée : surveiller et punir. La loi permettra ainsi d’expérimenter l’élargissement des pouvoirs de la police municipale. Étendre le pouvoir répressif d’agents formés moins longtemps semble une curieuse réponse à la période, surtout quand il semble n’avoir pour but que de multiplier la possibilité de contraventions pour des petits délits (tag, consommation de stupéfiant, etc.). Derrière cette décision, c’est toujours l’obsession de l’amende et du chiffre. Les nouvelles dispositions législatives octroieront même ce pouvoir de délivrer des contraventions à des sous-traitants privés. En dessaisissant ainsi l’État de sa mission régalienne, nos gouvernants prouvent qu’ils préfèrent placer leur confiance dans des acteurs privés que dans l’outil collectif censé être au service de ses citoyens.
Ce projet de loi est une attaque antidémocratique qui instrumentalise le terrorisme pour s’attaquer à notre culture démocratique. En faisant des citoyens la cible plutôt que le fondement de la légitimité de gouverner, le gouvernement offre aux terroristes l’opportunité d’une victoire morale coûteuse.
Quand l’on considère ceux que l’on sert comme des suspects ou des coupables, réduire leurs libertés et leurs droits est l’étape logique suivante. Ainsi, la loi sécurité globale propose dans son article 21 de permettre l’exploitation en direct des images des caméras portées par les membres des forces de l’ordre, pouvant les conserver jusqu’à 30 jours, sans préciser si les citoyens concernés y auront accès. De même, elle offrira par son article 22 un cadre légal pour l’utilisation de drones et engins aéroportés de surveillance. Difficile d’y voir de nouveau un instrument de la lutte contre le terrorisme quand ces dispositifs sont surtout utilisés pour mettre au pas les citoyens qui se mobilisent et exercent leur droit de contester démocratiquement les décisions politiques ou les conditions de vie qui sont les leurs. Pour justifier chaque recul de notre droit à une vie privée, la même petite musique pernicieuse se fait entendre : « Si vous n’avez rien à vous reprocher, vous n’avez rien à craindre ». Mais qui déterminera ce qui demain pourra nous être reproché quand nos gouvernants ne cessent de démontrer leur manque de confiance criant dans la participation de toutes et tous à l’orientation politique de notre société ?
En voulant interdire la diffusion d’image des policiers en mission dans son article 24, le texte fonde même un nouveau pouvoir de criminalisation qui pourra toucher tour à tour journalistes, observateurs associatifs ou simples citoyens qui seraient amenés à filmer des policiers faisant un usage disproportionné de la force. Il n’y a jamais de limites à la suspicion lorsque le pouvoir l’alimente. Comment prouver une violence policière, comment établir les faits sans ses images ?
Nous devons conserver le droit de questionner et remettre en cause l’ensemble des dispositifs qui s’attachent à régir nos vies. En démocratie, il n’y a pas d’ordre public qui ne repose sur le consentement des citoyens. Nous devons pouvoir disposer de contre-pouvoirs à celui de l’État. C’est le principe de l’État de droit : prééminence du droit sur le pouvoir politique.
Ce projet de loi est donc une attaque antidémocratique qui instrumentalise le terrorisme pour s’attaquer à notre culture démocratique. En faisant des citoyens la cible plutôt que le fondement de la légitimité de gouverner, le gouvernement offre aux terroristes l’opportunité d’une victoire morale coûteuse. Il veut faire oublier que notre sécurité ne se réduit pas à échapper à la violence mais qu’elle s’exprime dans la construction des conditions nécessaires à une vie réussie, riche d’opportunités, de relations, de plaisirs. Voilà ce que serait le sens d’une sécurité globale.
Le célèbre généticien, auteur de nombreux ouvrages de vulgarisation, publie un texte fort sous forme de billet d’humeur sur son compte Facebook . Nous le reproduisons ici dans son intégralité, car il s’agit d’une série de questionnements qui traverse aujourd’hui de nombreux chercheurs, enseignants et vulgarisateurs…
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QU’AVONS NOUS MANQUÉ, nous les intellectuels, scientifiques et vulgarisateurs de la fin du XXe siècle ?
Telle est la question que je posais hier en conclusion de mon cri de détresse « J’ai mal à ma France » ?
Je crois comprendre pourquoi la France est la plus touchée par la déferlante du complotisme et de l’appétence exclusive pour les « vérités alternatives ». Notre nation, fière de sa grande Révolution française, est fille du Progrès et de son optimisme. Il irrigue la République adoratrice de la raison, est la colonne vertébrale des courants socialistes du XIX siècle, du marxisme et du communisme au XXe mais aussi du libéralisme saint-simonien et du capitalisme industriel. L’optimisme du progrès est enseigné à l’école, il charpente « Le Tour de France par deux enfants », prend une dimension mystique avec le positivisme comtien auquel adhèrent Pasteur, Claude Bernard, peu ou prou Jean Rostand. Le programme du CNR en est baigné. Or, le bonheur n’a pas été au rendez-vous, son objectif était implicite dans le progressisme. Beaucoup de citoyens, amoureux éperdus du Progrès mais trompés et déçus, ont alors transformé leur passion en rage et agressivité envers l’amant infidèle.
L’opprobre a touché tous les pouvoirs et puissances, ceux de la politique, bien entendu, mais aussi de la « science officielle ». En effet, a-t-on sans doute pensé, ils détenaient les rênes et ont conduit l’attelage vers cette situation qui frustre tant. Puisque le Progrès et la science ont déçu, porte ouverte au n’importe quoi. La raison n’a pas conduit au bonheur. Bienvenue à la déraison. Partout les gouvernements et présidents, de gauche comme de droite,ont été balayés par les votes ou l’émeute. En France, le phénomène s’est vêtu d’un gilet jaune en 2018, puis d’une passion à l’occasion de la pandémie pour tout ce qui semblait être alternatif, Raoult, Perronne, Toussaint, Toubiana et autres zozos. À cela, nous ne pouvions pas grand chose, beaucoup d’entre nous ont milité pour la justice et la bienveillance, sans résultat notable.
L’autre phénomène est le combat inégal, pour l’accès à l’intérêt des jeunes, entre la table trigonométrique et les jeux vidéo se déployant dans un monde virtuel. Nous nous sommes efforcés de rendre la première attrayante. Mais n’avons pas fait le poids confronté aux artifices de l’excitation colorée, trépidante, de la jouissance éphémère mais immédiate. Le réseau frénétique des réseaux sociaux est attrayant, prenant puis addictif, laissant dans l’esprit peu de disponibilités pour d’autres sources de stimulation. Certains intellectuels, des « philosophes » en particulier, ont pris conscience de la nouvelle architecture des réseaux aboutissant à l’esprit des gens, des mœurs de mauvais garçon de ceux qui les empruntent, ils se sont alignés. Résultat, ils sont plus devenus eux-mêmes des mauvais garçons plus que leurs cibles des philosophes en herbe ! D’autres ont renoncé et se sont retirés avec quelques uns des leurs sous leur tente.
J’ai, avec quelques collègues, expérimenté une troisième stratégie pour me faire entendre : utiliser les outils prisés par les récepteurs potentiels de mes enseignements et propos, au service cependant de mon langage et de la forme de mes messages. Le résultat n’a pas été brillant. L’effet sur les cibles dépend à la fois de l’arme et du projectile. Un bouquet de roses tiré par un canon est aussi inefficace qu’un boulet projeté par une fronde. Nous avons échangé, je suis sur le pont depuis quarante ans : outre mes tâches de médecin, chercheur et autres choses, j’ai donné d’innombrables conférences, suis allé dans des centaines de lycées, ai une expérience professionnelle de la télé et de la radio. La réceptivité à mes messages a décliné. La pente s’est accentuée dans la société du XXe siècle. Et on est dans cette France qui me fait mal.
Oui, les quelques personnes – peu nombreuses – ayant mon expérience ont sans doute loupé quelque chose, je ne sais pas quoi, si ce n’est qu’à l’inverse de la Reine rouge d’Alice, ils ont couru moins vite que le paysage, que la société. Ils ont échoué.
Extraits d’ un article de Siné Mensuel n° 101 – novembre 2020
Serge Sanches
Entre 8 heures et 9 heures, les matinales font partie des tranches horaires d’information les plus suivies. De fait, les plus hauts responsables politiques y participent volontiers, voire sollicitent une invitation ! Sur une période assez longue (du 26 mai au 24 juillet), nous avons examiné quels partis ou quelles sensibilités politiques étaient à l’antenne. Au total (sur les cinq jours de la semaine), nous avons relevé 273 invités, hors les médicaux et les « neutres » (sportifs,écrivains,scientifiques…). Notre choix s’est porté sur 9 media, en réalité 7 puisque BFM et RMC diffusent la même interview, tout comme France-Info Radio et télévision.
Quels sont les enseignements que nous pouvons tirer sur la partialité des différents medias pour notre gouvernement ?
Le collectif Auzon l’Artière propres vous propose deux vidéos documentaires sur la rivière L’Allier, le fleuve la Loire et deux émissions H2O France Bleu animé par Christophe NOISEUX : Julien Saillard du Conservatoire d’Espaces Naturels Auvergne et le reportage H20 sur les rivières L’Artière et L’Eau Mère :